Près de mon lieu de travail, il y a un cimetière. J’aime déambuler dans ces lieux. J’y vais à l’occasion durant l’heure du lunch. C’est paisible. Quand on s’y promène, on ressent des tas de souvenirs-fantômes diffus qui flottent ici et là à hauteur d’homme autour de ces noms gravés dans la pierre. Des histoires d’amour et des drames aussi. Des couples qui ont vécu ensemble très longtemps et qui sont décédés presqu’en même temps, comme s’ils n’avaient pu vivre l’un sans l’autre. D’autres pierres, sont presque complètement effacées par l’usure du temps, comme si ces personnes décédées avaient perdu leur nom, faute de descendance pour garder vivant ce qu’ils ont été. Et puis, cette pierre m’a particulièrement touché. Un couple, Patrick et Mary Hackett, ont perdu 6 de leurs enfants, âgés de moins de 3 ans entre 1845 et 1856. À cette époque, la mortalité infantile était élevée. 20% d’entre eux mouraient dans leur première année de vie. Aujourd’hui, on s’attend tous implicitement à faire éventuellement face à la mort de ses parents, mais pas à celle de ses enfants. La gastro-entérite était souvent la cause des décès au milieu du 19ième siècle. Beaucoup de femmes n’allaitaient pas leur bébé. On leur donnait du lait de vache non pasteurisé et l’eau courante n’était pas non plus contrôlée.
Des 6 enfants de Patrick et Mary décédés en bas-âge, 3 avaient été nommés Thomas. C’est quasiment une malédiction.